Comme redouté, la Commission européenne a officiellement lancé, ce mercredi 3 septembre, la procédure de ratification de l’accord entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (en même temps d’ailleurs que celle de l’accord avec le Mexique1).
Scission de l’accord
Alors que l’élevage européen est déjà en difficulté, et que les prévisions de production sont encore à la baisse, la Commission européenne fait le choix de saborder encore davantage sa production.
Avec le lancement de la procédure de ratification, elle entend faciliter l’entrée de viandes bovines ne respectant aucune de nos normes depuis les pays du Mercosur.
Pour rappel, l’accord prévoit un contingent de 99 000 t à droits de douane réduits à 7.5 %, ainsi que la suppression des droits sur les 58 000 tec du contingent Hilton existant, actuellement soumis à 20%.
Si le contenu de l’accord avec le Mercosur était déjà connu, et largement décrié en France, l’annonce de cette rentrée concerne principalement les modalités de ratification : la Commission européenne officialise une scission de l’accord, afin que la partie commerciale ne soit votée qu’à la majorité qualifiée des Etats Membres (et non plus à l’unanimité), retirant ainsi le véto aux Etats Membres.
Compte-tenu de la situation politique européenne, il semble illusoire d’imaginer que cette décision ait été prise sans l’aval de la France… qui a sans doute délibérément abandonné son droit de veto.
L’alibi de la « clause de sauvegarde »
La Commission a annoncé avoir tenu compte des préoccupations des Etats membres inquiets (notamment France, Pologne et Italie), en travaillant sur la clause de sauvegarde.
Il faut savoir que cette clause de sauvegarde était déjà présente dans l’accord, et, de l’aveu de tous, totalement inopérante ! La France l’avait d’ailleurs admis lorsqu’elle s’opposait encore publiquement à « l’accord en l’état », en demandant des garanties du Mercosur sur les normes de production et les engagements environnementaux.
Aujourd’hui, la France semble publiquement se satisfaire de ces annonces… Pourtant, l’accord n’a pas du tout été modifié depuis la fin d’année dernière : il n’y a pas plus de garanties concernant les normes ou l’environnement, que de nouveauté concernant cette clause !!!
En cette rentrée, la Commission a simplement produit un document2 unilatéral et non législatif (donc sans l’accord du Mercosur, et qui n’a aucune portée contraignante). Elle y annonce un suivi régulier de la conjoncture et la possibilité de mettre en œuvre des mesures de protection de son marché, si des preuves de préjudices sont avérées3 ! Ce n’est que de la poudre aux yeux, servant d’alibi aux Etats membres comme la France afin qu’ils valident l’accord !
Et maintenant ?
Désormais la procédure de ratification est lancée, et plusieurs étapes doivent encore être franchies, donnant encore des possibilités d’action !
- Au Conseil européen : si la possibilité d’un véto français semble désormais écartée, celle d’une minorité de blocage reste possible (bien que peu probable)
➔ En tout état de cause, il faut maintenir la pression sur la France, afin qu’elle continue à s’opposer publiquement à l’accord, et travaille justement à cette minorité de blocage
- Au Parlement européen : celui-ci doit s’exprimer sur l’accord à la majorité
o Les Parlementaires européens français, très majoritairement opposés à l’accord, travaillent à obtenir une opposition du Parlement. A ce stade, il semble que ce vote pourrait se jouer à quelques voix près, dans un sens ou dans l’autre
➔ Il est donc très important de solliciter l’ensemble des parlementaires du territoire, afin de maintenir la pression sur les groupes politiques
- Via la Cour de Justice Européenne : il est aussi possible de saisir la Cour de Justice Européenne (CJUE) afin qu’elle se prononce sur la procédure de ratification ainsi que sur la cohérence du texte avec les ambitions européennes (notamment environnementales)
➔ Un groupe de parlementaires européens travaille actuellement à cette possibilité, et il nous semble important de soutenir cette action !